Henning MANKELL "Les chaussures italiennes"
A soixante-six ans, Fredrik Welin vit reclus depuis une décennie sur une île de la Baltique avec pour seule compagnie un chat et un chien et pour seules visites celles du facteur de l'archipel. Depuis qu'une tragique erreur a brisé sa carrière de chirurgien, il s'est isolé des hommes. Pour se prouver qu'il est encore en vie, il creuse un trou dans la glace et s'y immerge chaque matin. Au solstice d'hiver, cette routine est interrompue par l'intrusion d'Harriet, la femme qu'il a aimée et abandonnée quarante ans plus tôt. Fredrik ne le sait pas encore, mais sa vie vient juste de recommencer. Le temps de deux solstices d'hiver et d'un superbe solstice d'été, dans un espace compris entre une maison, une île, une forêt, une caravane, Mankell nous révèle une facette peu connue de son talent avec ce récit sobre, intime, vibrant, sur les hommes et les femmes, la solitude et la peur, l'amour et la rédemption.
Avis partagé pour ce roman. J'ai apprécié l'écriture tout en retenue, en finesse qui sait s'imprégner de l'environnement incroyable que fournit la Suède à l'auteur, on se sent tout de suite pris dans ses eaux glacées, on sent le souffle froid du vent sur notre visage comme on respire un peu mieux quand les glaces fondent et annoncent l'été. L'impact de la nature sur le livre est tout aussi essentiel que celui des personnages. L'un est indissociable de l'autre. Car deux endroits deviennent centraux pour le roman : une caravane perdue en forêt et une vieille bicoque isolée sur une île solitaire. Deux endroits qui nous rendraient vite claustrophobes n'eut été la possibilité sans cesse renouveler d'un ailleurs, d'un espoir de recours à la solitude qu'ils font peser sur nous. Ces sentiments de solitude, d'oppression parfois, sont vite ressentis à la lecture de ces lignes, ça m'a rendue mal à l'aise, pourtant, je vois là tout le génie de la plume de Mankell, qui mêle ici "le geste à la parole" si je puis me permettre l'expression. Ces lieux désertiques sont les endroits où vont se réfugier des personnages excentriques, exubérants, parfois juste "à part" ou "en marge de la société", ils deviennent le point de rencontre entre des destins fracassés, comme brisés. Un point de chute, de non retour ou encore de renouveau, à chacun son destin. De ce côté-là, le livre est épatant, criant de vérité. Le problème, ce sont, d'abord, le personnage principale, totalement antipathique, à qui on a juste envie de mettre des baffes de bout en bout, totalement égocentrique et pas du tout avenant. Pourtant, on sent bien que, puisqu'il est au centre du roman, c'est qu'il évolue vers un autre lui-même, celui-là peut-être "meilleur" en tout cas que celui qu'il est au début de l'histoire, mais franchement, même à la fin et malgré quelques petits éclairs d'amélioration, je n'ai pas réussi à adhérer à ses actions, à son comportement, à ce qu'il représente. Ensuite, les personnages qui l'entourent, malgré le fait qu'ils aient chacun une personnalité bien définie, assez loufoque ou originale, ne m'ont pas convaincue non plus. On a l'impression de tomber quand même dans l'extrême avec la manchote, le facteur hypocondriaque, la fille révolutionnaire, la vieille alcoolique, etc. Bon, c'est peut-être pousser le trait un peu loin, en tout cas, c'est mon avis. Mais il est vrai que sans ces personnages "secondaires", il n'y aurait tout simplement rien à raconter, car ce sont eux qui vont tirer le vieux Fredrik de sa léthargie longue de douze années et l'obliger à s'ouvrir aux autres et à lui-même de fait. J'ai été frappée par la solitude de chacun de ces personnages, par leur calvaire respectif, fascinée par les décors décrits par Fredrik, par ce qui mène des gens ordinaires à tout quitter pour vivre en ermite, mais je n'ai pas été conquise, étrange non ? Je me suis ennuyée tout au long du roman. Un détail m'a obsédée tout du long : quelle est la signification de la fourmilière dans le salon ? Si vous avez lu ce livre, dites-le moi svp. Finalement, il n'y a pas d'action dans ce livre, tout est dans la psychologie, dans le non-dit, ça laisse certes pas mal de place à l'imagination du lecteur mais pour ma part, j'avais le cerveau sans doute embrumé car je n'ai pas accroché. Ce n'est pas une lecture que je vous conseille particulièrement, maintenant, elle est, par bien des points, représentative du style d'écriture des auteurs nordiques, alors je vous laisse juger par vous-mêmes !
Nombre de pages : 340
Temps de lecture : 3h30
Prix : 21.80 euros