Tout d’abord, je dois dire que j’ai toujours considéré cet ouvrage comme un classique de la littérature américaine qu’il faut absolument avoir lu au moins
une fois dans sa vie. Mais, comme "Sur la route" de Kerouac ou "Ulysse" de Joyce, il faisait partie de ces classiques qu’on se réserve pour plus tard et qu’on ne prend finalement pas le temps
de lire … Cette lecture commune m’a permis de découvrir un livre différent de ce à quoi je m’attendais.
En effet, il n’a pas ce côté barbant voir un peu lourd des classiques où sens où je l’entends (voir Céline, Proust et tous leurs amis !). Ce livre-ci m’a
touché, émue, bref il m’a beaucoup plu ! D’abord, j’ai eu un peu de mal à rentrer dans l’histoire, j’avais un problème avec le style d’écriture, le scénario qui se déroulait, l’ambiance, je ne
sais pas pourquoi, l’évidence ne s’est pas imposée de suite. C’est au fur et à mesure de l’avancement dans le texte que j’ai pu mesurer toute l’ampleur de la beauté de ce texte, de sa
tristesse, de sa rudesse, de son injustice aussi. C’est un texte fort. Un texte qui traite un sujet délicat, difficile, mais qui malheureusement est encore d’actualité. Ce roman nous parle,
avec ses mots, ceux d’une petite fille, de racisme, d’injustice, de cruauté, de toutes ces choses qu’on aimerait voir éradiquer.
J’ai apprécié le fait que ce soit Scout qui nous raconte cette histoire, de son point de vue, celui d’une petite fille de 8 ans. On voit le monde des
adultes comme un univers codifié, impénétrable, on sent qu’elle ne comprend pas tout ce qui s’y passe mais qu’elle essaie. On sent sa naïveté, sa candeur face aux évènements. Et petit à petit,
on sent aussi son incompréhension, sa colère, elle a du mal à ne pas jouer des poings pour défendre son père, accusé d’être "l’ami des nègres". Le texte bascule de la joie de l’enfance, des
jeux d’étés, de l’insouciance à la dure réalité de la vie, à la peur, à l’angoisse. Le roman gagne alors en profondeur, le récit prend de l’ampleur et nous dévoile toute l’horreur de l’Alabama
dans les années, une Amérique ségrégationniste, où les noirs sont traités comme des non-humains, comme des criminels.
L’histoire de Tom Robinson, homme noir accusé d’avoir violer une jeune fille blanche, vient se greffer à celle de la vie quotidienne de Scout, Jem et leur
père. Ces deux récits vont s’entremêler dès le début du procès et là, on bascule en dehors de la fiction. Tout m’a semblé si réel, si juste, si bien écrit. On ressent tellement d’émotions
fortes, avec la scène de la banque, la scène du tribunal aussi. Et on découvre aussi le vrai visage de la société de cette ville de l’Alabama, comme un miroir de l’Amérique de l’époque, on voit
petit à petit les masques tombés, on comprend pourquoi les gens agissent de telle ou telle manière, ce qui les poussent à le faire. Comment un homme peut-il vouloir en tuer un autre du simple
fait de sa couleur de peau ? Pourquoi un homme est mis aux bancs de la société parce qu’il est noir ? Pourquoi personne n’accord la présomption d’innocence à un homme noir ? On se dit que ces
gens bien-pensants devraient se conduire autrement, comment des gens qui se disent intellectuels, cultivés, croyants, peuvent-elle considérer un autre homme comme un animal ? C’est un discours
qui est toujours d’actualité. Comment peut-on laisser faire ça ? J’ai beaucoup aimé les interventions d’Atticus sur le sujet, il est le symbole de la sagesse, la mesure, tout au long du texte
et vient calmer les flammes qui s’agitent en Scout en essayant de lui faire comprendre la vie tout simplement. Oui, ils agissent comme ça mais il faut essayer de se mettre à leur place et de
comprendre pourquoi ils le font et ne pas les condamner. Eh bien, cet homme-là m’a vraiment impressionnée ! La douceur, le calme, l’immense compréhension qui émane de cet avocat sont
incroyables !
Toute cette famille atypique est attachante, la petite fille garçon manqué qui ne veut pas porter de robe, le grand frère qui devient un homme et
Calpurnia, la nourrice/cuisinière/femme de ménage de la famille qui fait plus office de mère que de bonne. Ces quatre personnages sont au cœur de l’histoire et nous permettent de multiplier les
points de vue sur la situation qui s’y déroule, j’ai adoré le fait que chacun donne son avis et que le lecteur puisse ensuite se faire sa propre idée de la société dans laquelle évoluent nos
personnages. Le personnage le plus mystérieux, celui de Boo Radley, est finalement l’un de ceux qui ont le plus d’importance dans le récit, il l’influence d’une drôle de manière. Un homme qui
reste toujours enfermé et ne sort jamais de chez lui, forcément ça soulève des questions, dont celle qui va sous-tendre tout le texte : pourquoi ? Pourquoi choisir de ne pas mettre un pied
dehors, jamais ? Je ne donne pas la réponse, vous la trouverez dans le livre et je peux vous dire qu’elle est d’une logique imparable !
J’ai beaucoup aimé l’innocence de Scout, petite fille blanche qui n’hésite pas une seconde à pénétrer dans l’église des noirs de la ville, à s’asseoir
auprès d’eux au tribunal, à s’élever contre des hommes blancs qui menacent son père. C’est un personnage fort que ce petit bout de femme. Par sa naïveté, elle illumine ce texte, lui donne le
sourire, le fait rire par moments, elle met malgré tout un peu de gaieté dans cette triste histoire. J’ai adoré le comique de certaines situations dans lesquelles on la retrouve, notamment lors
de son premier jour d’école. On ne peut que l’adorer cette petite fille, c’est un rayon de soleil, rebelle, indépendant et qui pourtant n’a de cesse de chercher l’abri douillet et réconfortant
des bras de son père. La voir grandir est un bonheur !
Pour conclure, je dirais que j’ai été ravie de découvrir ce très beau roman, écrit tout en douceur, de façon poétique aussi parfois, où se mêlent des
personnages hauts en couleur, attachants (là je pense aussi à Miss Maudie et à Dill dont j’ai peu parlé mais qui m’ont beaucoup plus aussi), parfois agaçants. C’est un roman qui amène à
réfléchir sans trop en montrer, la réflexion se fait intérieure, on a finalement peu de détails jusqu’à la fin du roman, et ça aussi j’ai apprécié car c’est au lecteur de se faire sa propre
opinion. Rien n’est imposé. Ce livre m’a donné le sentiment d’être une parfaite harmonie entre la légèreté du monde de l’enfance et la lourdeur pesante du monde des adultes. Un livre qu’on peut
lire à tout âge et qui ne manquera pas de vous toucher. On en sort pas indemne de cette histoire et même après avoir fermer ces pages, on continue de se poser des questions. La principale étant
pour moi : mais comment a-t-on pu laisser tout ça arriver ? Et je pense qu’Atticus me dirait : mets-toi à leur place ! Eh bien c’est ce que je compte faire …
Vous l’aurez compris ce livre n’est pas un classique pour rien et vous ne regretterez pas de l’avoir lu ! Ce livre est tout simplement magnifique
!