Erik L'HOMME "A comme association, tome 5"
Ombe ne mentait pas. On vole littéralement.
Plus de feux, plus de panneaux, juste les lumières de la ville qui se confondent dans une grande traînée lumineuse.
Et le rugissement du moteur.
Je me cramponne, les deux bras autour de sa taille.
Je ne peux m'empêcher de respirer son odeur, près de son cou. Ce n'est pas du parfum mais une fragrance naturelle. Un mélange de mousse et d'herbe brûlée, de
pierre chauffée au soleil et d'eau de rivière.
C'est délicieux.
Mon coeur s'affole tandis que je me contrains au calme. Le mot «soeur» m'est venu naturellement, tout à l'heure. Il s'est imposé à moi comme une évidence. Il
me paraissait le plus adapté, le plus juste pour décrire ce que je ressens au fond de moi depuis ce soir - depuis toujours ?
- C'est le plus beau Noël de ma vie ! je hurle contre son casque.
- Hein ? Je n'entends pas ! répond-elle en penchant la tête.
- Non, rien !
Et pour moi, seulement pour moi, je chante à tue-tête les paroles des Doors qui disparaissent dans la nuit, emportées par le vent de la course
:
«Take a long holiday
Let your children play
If ya give this man a ride
Sweet memory will die
Killer on the road, yeah...»




Depuis le début de ma lecture de cette saga, je disais que les livres de Bottero surpassaient ceux de L'homme, ils avaient ce petit plus qui me le rendaient
plus "magiques". Eh bien, là, j'ai été subjuguée par ce tome 5 qui surpasse à mon avis les précédents. Erik L'Homme a su m'entraîner en un souffle dans cette histoire que j'ai pris énormément de
plaisir à suivre. J'ai été ravie de me faire surprendre de la sorte par son style qui m'amenait à vouloir aller toujours plus vite pour lire la page d'après. En bref, j'ai adoré
!
Dans le détail, c'est donc l'écriture qui, en premier lieu, m'a accroché à ce roman. Je l'ai trouvé magnifique, pleine d'émotions, de gravité mais encore une
fois aussi, d'humour. Pas l'humour un peu lourd du Jasper auquel on est habitué, un humour qui joue plus sur la nuance, ce qui est appréciable. C'est donc un style plus profond, plus poussé, qui
m'a permis de mieux apprécié ce roman. Le rythme des mots colle parfaitement à la vitesse de l'intrigue que l'on suit dans un souffle unique, ne soupirant qu'à la fin du roman. Le style de
l'auteur nous prend dans ses filets dès les premières lignes, l'émotion est intense et cette intensité ne nous quittera plus jusqu'à la fin. On est avance dans ce roman comme sur une corde raide,
la peur ne nous lâche pas, l'angoisse non plus. C'est très bien rendu par la poésie du texte je trouve. L'écriture renforce la puissance du récit qui en soi est palpitant, haletant. On sent
l'urgence, la détermination et la colère qui percent derrière chaque mot, chaque signe. Je ne pensais pas en ouvrant ce livre le trouver si sombre, si oppressant, pourtant, ce fut le cas. En même
temps, je m'y attendais un peu mais je ne pensais pas que l'auteur saurait retranscrire d'une aussi belle manière tant de tristesse, de désespoir et de rage contenue. Lui qui avait créé un
personnage plus léger que Pierre Bottero a réussi à lui donner ici une profondeur et une sincérité telles que, même si on pouvait le trouver légèrement horripilant auparavant, on ne peut plus
penser ça de lui à présent. C'est un superbe personnage que l'auteur met ici en avant, servit par un style qui le rend attachant et lui construit une image plus complexe que celle que nous lui
connaissions jusqu'à présent.
Le début du roman est brutal. On avait quitté Jasper et Ombe en moto le soir de Noël, on retrouve Jasper, seul, à l'hôpital. Ombe est morte. Le choc ! Bon,
forcément, étant donné que l'auteur est malheureusement décédé avant la parution de ce tome, je me doutais bien qu'il y aurait quelque chose de spécial pour la suite, mais, quelque part, je
n'aurais pas cru qu'il ferait mourir ce personnage que j'appréciais tant. En même temps, je pense que l'histoire d'Ombe et de Jasper est ici amplifiée par la propre expérience de l'auteur qui,
lui aussi, a perdu un ami. Justement, ça rend ce roman-ci plus intimiste, plus fort en émotions aussi. Du début à la fin, on retient nos larmes, c'est fort, c'est triste mais c'est beau aussi.
Comme une sorte d'hommage. J'ai beaucoup aimé le fait que la réalité rejoigne ici un peu la fiction, ça ne la rend que plus prégnante, plus réaliste. Du coup, le lecteur s'attache plus facilement
au "nouveau" Jasper, si je puis le formuler ainsi. Ce que j'ai beaucoup aimé aussi c'est le fait qu'Ombe ne disparaisse pas totalement, puisque l'auteur la fait converser en pensé avec Jasper.
Ces petits échanges, souvent teintés d'humour, m'ont fait sourire. Ça dénote bien toute l'importance de leur relation à tous les deux, tout ce qu'elle avait de vrai, de fort, on les aperçoit se
chamaillant, se lançant des piques, comme le feraient un frère et une sœur. C'est tendre, c'est affectueux et ça rajoute encore au côté "sentimental" de ce roman. Ces moments-là ont sans doute
été mes préférés du roman, j'ai trouvé ce concept original. Ça met bien en valeur la relation que ces deux personnages auraient pu avoir ensemble et qu'ils n'auront jamais. Ça a quelque chose de
mélancolique et de joyeux aussi, tout est dans la contradiction, la complémentarité dans ce livre.
Ce qui m'a le plus étonnée, même si, au final, c'est une suite logique, c'est le personnage de Jasper. Waouh ! Alors là, j'avoue, je ne pensais pas qu'il
évoluerait à ce point-là, mais c'est une bonne chose ! Après l'annonce de la mort d'Ombe, il n'a qu'une idée en tête, la venger. Eh bien, je gentil petit garçon timide va laisser la place à un
homme, déterminé à obtenir la peau de celle qu'il considérait comme sa soeur et ça va saigner. Je savais aux vus des tomes précédents qu'il était courageux mais là, ça va au-delà de ça. Il se
métamorphose réellement et grandit. Il va se lancer alors qu'il est lui-même blessé sur les traces du tueur d'Ombe. Il va devoir le faire en se cachant de l'Association, Mademoiselle Rose et
Walter étant trop inquiets à son sujet pour le laisser enquêter, mais également en se cachant d'un ennemi insoupçonné et qui se cache derrière l'assassinat d'Ombe. C'est donc dans une cavale, une
course contre la montre, qu'est embarqué le lecteur. On suit Jasper, déjoué les plans de Walter, de Mlle Rose et de ses ennemis à coup de sorts, de potions et d'incantations toutes plus
puissantes les unes que les autres, usant de la ruse, de son imagination et de ses connaissances pour arriver à ses fins. Jasper devient un magicien puissant, ou devrais-je dire surpuissant,
arrivant à effacer ses traces afin que nul ne le retrouve alors que tous sont à sa recherche. J'ai été impressionnée par ce personnage qui prend encore plus d'ampleur dans ce tome, se révélant
intelligent, extrêmement courageux, légèrement inconscient peut-être aussi, mais surtout j'ai été bluffée par le fait qu'il veuille tuer quelqu'un d'autre. Voilà une chose dont je ne l'aurais pas
cru capable. Et pourtant, il va tout faire pour éliminer l'homme responsable de la mort d'Ombe. Il devient froid, calculateur, et pourtant, on sent qu'il est toujours cet ado fébrile, timide, un
peu maladroit au fond. C'est une évolution que j'ai trouvé malgré tout radicale, comme si Jasper passait du côté obscur de la force en quelque sorte. A voir ce que la suite va nous apprendre de
plus là-dessus, en attendant, je suis dans l'expectative.
Mais ce qui m'a touchée aussi dans ce personnage, c'est sa détresse. On sent toute la solitude qui pèse sur lui s'imprégner un peu plus à chaque page. Il
avait Ombe, il ne l'a plus, il avait ses deux amis, Jean-Lu et Romu, mais il ne peut pas s'approcher d'eux, il avait Walter et Rose, mais ceux-ci veulent l'empêcher d'agir, ils avaient sa mère,
mais elle est en voyage à l'autre bout du monde ... On ressent ce vide, ce froid intense, de la solitude, derrière chaque conversation qu'il entretient avec Ombe dans son imaginaire, derrière
chaque moment où il doit agir et qu'il n'a personne vers qui se retourner. J'ai trouvé que cela renforçait encore plus l'intensité du roman, son côté "réel", les émotions que peut ressentir le
lecteur lors de sa lecture. Pas une minute, la gravité de la situation ne nous échappe, on est pris dedans, comme englué dans un monde de désespoir, de désolation. Plus rien n'existe en dehors de
cette idée fixe : Ombe est morte, son assassin doit payer. Cette idée fixe qui porte Jasper envahit aussi l'esprit du lecteur. On se demande, au fil des découvertes et des révélations qui
s'instillent dans le roman, ce qui va bien pouvoir se passer ensuite. Jasper va-t-il réussir à venger Ombe ? Que fera-t-il ensuite ? Tension est le mot clé dans ce roman. On se demande ce qui va
arriver à la page d'après mais surtout comment Jasper arrive à faire tout ce qu'il fait sans s'effondrer. Il ne s'agit pas d'un deuil ici, il s'agit de passer à l'action. Et de l'action, ce roman
n'est manque pas, c'est réellement prenant, le lecteur est tenu en haleine tout du long et n'a qu'une envie : en savoir plus. Mystères et secrets sont au rendez-vous, attisant notre curiosité. Et
la révélation à la fin du roman ne nous donne qu'une envie : vite lire la suite !
Vous l'aurez compris, du moins, je l'espère, j'ai tout simplement adoré ce cinquième tome ! Je l'ai trouvé magnifique, tellement beau que j'ai pris plusieurs
notes pour garder quelques phrases en tête. C'est un roman qui parle de mort, d'amour, d'amitié, de tendresse, de vengeance, de peur, de force, de courage, c'est un livre qui ne laisse pas
indifférent car il nous parle. Son personnage principal, tellement attachant, nous le rend encore plus précieux. Vraiment, si vous hésitez à poursuivre votre aventure avec cette saga ou que vous
ne l'avez pas encore débutée, je n'aurais qu'une chose à vous dire : foncez ! Vous ne le regretterez pas !
Nombre de pages : 208
Temps de lecture : 2h15
Prix : 10.05 €